LA FABRIQUE DE LA HAINE

L’acquittement par le Tribunal de Versailles le 28 septembre dernier du policier Pascal Hiblot, meurtrier du jeune Youssef Khaïf, est une parodie de justice et une véritable provocation à la haine. Parodie de justice : un procès retardé pendant dix ans, un tribunal en état de siège, une salle réservée pour l’essentiel aux policiers venus soutenir leur collègue, appuyés par le représentant d’un parti fasciste, un jury exclusivement composée de français de « souche », un représentant du ministère public complaisant, des délibérations bâclées. Pour la première fois en France, un accusé dont la culpabilité est établie est purement et simplement acquitté.

Provocation à la haine : à l’heure où l’on célèbre le vingtième anniversaire de l’abolition de la peine de mort, le permis de tuer délivré aux policiers par le Tribunal de Versailles la rétablit en pratique pour les jeunes des banlieues. Voilà l’application de la fameuse « tolérance zéro », du « droit à la sécurité » et autre « juste sanction », dont la gauche comme la droite nous rebattent les oreilles depuis des mois. Le verdict inique du Tribunal de Versailles est fondé sur ce calcul cynique : si la justice est nulle part, la police est partout et elle saura faire respecter l’ordre dans les ghettos de l’apartheid social. À coups d’années de prison pour les brûleurs de voiture et, si ça ne suffit pas, de balles dans la nuque. A l’heure où s’alourdissent les dangers de dérives fanatiques, racistes et sécuritaires, il est de notre devoir de résister à cette fabrique de la haine en réaffirmant notre solidarité à la famille de Youssef et aux habitants du Val Fourré dans leur peine et leur combat pour la justice.